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Peut-on encore manger du chocolat ? Ce qu’en pensent les forêts tropicales

11.06.2019

Dans le cadre de la Semaine du Développement Durable, une table ronde a eu lieu le 5 juin après-midi, à la Cité du Développement Durable, et a réuni l’ATIBT, Commerce Equitable France, et Kinomé.

Notre association a participé à cette table ronde, pour continuer de capitaliser sur les travaux menés dans le domaine de l’agroforesterie (projet du FFEM), et qui ont fait notamment l’objet d’une communication il y a peu de temps au Congrès Agroforestier Mondial de Montpellier.

Au cours de cette table ronde, Kinomé a fait état des difficultés concernant le développement du cacao, notamment pour ce qui concerne les pratiques non durables, tout en soulignant qu’il en va de l’intérêt de tous d’avoir une production de cacao durable, compte tenu de l’évolution constante de sa consommation au niveau mondial.

En Afrique de l’Ouest, un constat évident est fait quant à la perte de couvert forestier en lien étroit avec le développement du cacao.

En Afrique centrale, la situation est bien différente car le couvert forestier reste important, mais des activités de complément sont nécessaires pour les communautés locales et pour la production de denrées alimentaires exportable, tout en permettant la diversification du modèle des concessions.

Même si l’agroforesterie est un outil parmi d’autres et ne prétend pas tout résoudre, celle-ci constitue une belle opportunité du fait de la résilience que son modèle peut permettre. Les climatologues prédisent en effet un avenir difficile pour la filière cacao si rien n’est fait au cours des prochaines années. Les conclusions lors du congrès de Montpellier ont mis en alerte les partenaires de la filière.

D’un autre côté, le monde forestier est en réalité très proche de la filière cacao, et à l’heure où la gestion durable doit être plus que jamais à l’ordre du jour, forêt et cacao peuvent se retrouver.

En effet, le modèle des concessions certifiées est aujourd’hui en difficulté, le marché ne permettant pas de le pérenniser. Dans ce contexte, l’agroforesterie pourrait être une opportunité d’avenir pour fournir tout à la fois une diversification à certaines concessions, une possibilité de fournir du bois d’œuvre mais également d’autres services sociaux et environnementaux.

Le rapprochement forêt et cacao est donc nécessaire dans chacun des deux cas, en « introduisant la forêt dans les cacaoyères » pour ce qui est l’Afrique de l’Ouest, ou en « introduisant le cacao dans les forêts dégradées » du bassin du Congo.

L’association cacao-bois d’œuvre est donc une démarche territoriale qui semble évidente et intéressante pour les différentes parties prenantes d’un tel modèle.

Cette approche permet également de retrouver des savoir-faire en matière de culture de cacao sous ombrage, qui ont été quelque peu oubliés tout en restant largement valables.

Commerce Equitable France a évoqué un cas développé en Côte d’Ivoire, où l’agroforesterie en est à ses débuts. Certaines organisations paysannes initient des expériences agroforestières, comme avant elles d’autres organisations situées dans les pays andins, pour faire face à des enjeux sociaux et environnementaux liés à la culture du cacao. Les résultats sont d’autant plus prometteurs que les rendements sont supérieurs aux moyennes enregistrées au milieu paysan, la résistance à la sécheresse semble meilleure et les taux de survie des cacaoyers et des arbres, sont également très bons. Tous ces résultats sont d’autant plus notables que les organisations de producteurs sont solides et bien organisées. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, une coopérative (CAMAYE) a initié avec le programme Equité un projet qui a plusieurs buts (a) structurer les organisations de producteurs, (b) Renforcer les réseaux d’acteurs et (c) Utiliser le potentiel du commerce équitable.

Toujours en Côte d’Ivoire, une autre initiative a été lancée par Cémoi, à savoir le projet « Cacao ami de la forêt ». La société Tranchivoire, membre de l’ATIBT, a également lancé des activités pour stimuler le développement du Cacao sous ombrage.

Le rapprochement de l’ATIBT et des initiatives menées dans le domaine agroforestier a différents buts :

  • Identifier les essences forestières les plus pertinentes pour les modèles proposés,
  • Identifier les différentes filières, ici celle du cacao, avec lesquelles il est important de réfléchir,
  • Identifier les possibilités actuelles des sociétés concessionnaires pour mener certains projets pilotes,
  • Définir et tester un modèle économique gagnant-gagnant entre le planteur, le forestier et le chocolatier

Les questions de réglementation, et le foncier restent encore à régler majoritairement, même si dans des pays comme la Côte d’Ivoire il y a eu des évolutions récentes. Ce qui semble certain, c’est que cette réflexion entre différents acteurs de la Cité du Développement Durable arrive à point nommé en considérant les initiatives récentes de lutte contre la déforestation importée (SNDI), les problèmes climatiques évidents dans certains pays comme la Côte d’Ivoire, mais également la difficile viabilité du modèle de concession certifiée.

Membres de l'ATIBT