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Des données scientifiques de terrain pour la prochaine Conférence Cites

08.07.2022

Le projet « Actualisation du statut de vulnérabilité des espèces ligneuses exploitées en Afrique centrale » va contribuer à l’information fournie à la 19ème session de la Conférence des Parties de la CITES, qui aura lieu du 14 au 28 novembre 2022 au Panama.

La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction « CITES » a pour but de veiller à ce que le commerce international ne menace pas leur  survie. Dans le même sens, la Liste rouge de l'UICN fournit des évaluations du risque d'extinction pour plus de 80 000 espèces. Elle est devenue un outil important pour la conservation et pour éclairer plus largement la politique et la gestion des ressources naturelles.

En Afrique centrale, les dernières évaluations de certaines espèces d’arbres exploitées remontent souvent à plus de 20 ans. Ces évaluations sont généralement pauvres en informations sur l’abondance des espèces, leur écologie, l’évolution de la nature des menaces auxquelles elles font face. Par ailleurs, certaines évaluations souffrent de l’absence d’une approche scientifique robuste. Une mise à jour du statut de conservation IUCN des principales espèces exploitées s’avère donc urgente. Elle l’est d’autant plus que des velléités de boycotts des bois tropicaux ressurgissent régulièrement sans toutefois reposer sur des arguments solides. Une telle actualisation mènerait à identifier, sur des bases scientifiques récentes, (i) les espèces non menacées, dont l’exploitation peut être poursuivie suivant les normes actuelles, et (ii) les espèces réellement menacées, dont l’exploitation devrait être davantage contrôlée.

Un total de 20 espèces a été retenu en fonction de leur ancienneté de leur dernière évaluation sur la liste rouge de l’UICN (plus de 20 ans) ainsi que par rapport à leur importance économique estimée à partir des volumes de bois commercialisés. Il s’agit de Aucoumea klaineana (Okoumé), Afzelia bipindensis (Doussié), Bobgunnia fistuloides (Pao rosa), Cylicodiscus gabunensis (Okan), Dacryodes igaganga (Igaganga), Entandrophragma candollei (Kosipo), Entandrophragma cylindricum (Sapelli), Entandrophragma utile (Sipo), Erythrophleum suaveolens (Tali), Erythrophleum ivorense (Tali), Lophira alata (Azobé), Milicia excelsa (Iroko), Millettia laurentii (Wenge), Microberlinia bisulcata ou Microberlinia brazzavillensis (Zingana), Prioria balsamifera (Agba), Pterocarpus soyauxii (Padouk), Terminalia superba (Fraké), Testulea gabonensis (Izombé), Tieghemella africana (Douka) et Triplochiton scleroxylon (Ayous).

Le critère Ade l’UICN (Annexe 2 ; UICN, 2001) est principalement utilisé pour évaluer le statut de vulnérabilité des 20 espèces sélectionnées. Il s’agit d’évaluer la réduction de la population prévue (RPP), déduite ou supposée dans le futur (sur un maximum de 100 ans) en se basant sur (i) un indice d’abondance adapté aux taxons, (ii) la réduction de la zone d’occupation (AOO), de la zone d’occurrence (EOO) et/ou de la qualité de l’habitat, (iii) les niveaux d’exploitation réels ou potentiels et (iv) les effets de taxons introduits, de l’hybridation, d’agents pathogènes, de substances polluantes, d’espèces concurrentes ou parasites.

Pour chaque espèce, la RPP sur toute l’aire de distribution est estimée selon trois types d’utilisation des terres : (1) RPP au sein des forêts de production, (2) RPP au sein des forêts couvertes par les aires protégées, et (3) RPP au sein des surfaces occupées par le domaine non permanent.

  1. Pour les forêts de production, les données d’inventaires d’aménagement de 98 concessions forestières de cinq (05) pays (Cameroun, Congo, Gabon, République Centrafricaine, et République Démocratique du Congo) ont été obtenues sur une surface de 21 433 767 ha, soit 40% de la superficie totale de toutes les concessions forestières de l’Afrique centrale. A travers ces données d’inventaire d’aménagement, la structure de population de chaque espèce est définie en utilisant le nombre d’arbres par ha et par classe de diamètre (à partir de 20 cm). En outre, les données démographiques (croissance, mortalité et recrutement) et phénologiques sont mobilisées pour chaque espèce à travers le Collectif DYNAFAC. L’évolution de la population de chaque espèce au sein de ces forêts est simulée à l’aide d’un modèle intégrant la population initiale, les paramètres démographiques (croissance, mortalité et recrutement), le diamètre de fertilité obtenu à travers les données phénologiques et les paramètres d’exploitation (diamètre minimum d’exploitation, coefficient d’exploitation, et le taux des dégâts de l’exploitation) et calculée comme la différence entre la population initiale et la population finale d’arbres pour chaque espèce.
  2. Au sein des aires protégées, il est formulé l’hypothèse que la population d’arbres de chaque espèce est maintenue stable dans le futur. Ainsi sur 100 ans, la RPP au sein des aires protégées est égale à 0.
  • Dans le domaine non permanent, les perturbations anthropiques constituent les principales menaces et la RPP est calculée en utilisant le taux de déforestation.

La RPP globale sur l’aire de distribution de chaque espèce est estimée en calculant la moyenne pondérée des RPP des différents types d’utilisations des terres. Selon le critère A4 de l’UICN, lorsque la RPP dans le futur (sur un maximum de 100 ans) est supérieure ou égale à 30%, l’espèce est considérée Vulnérable. En revanche, si la RPP ≥ 50%, elle est considérée En danger, et En danger critique d’extinction si RPP ≥ 80%. Les analyses de données sont toujours en cours et les premiers résultats montrent le caractère robuste de l’approche méthodologique des données quantitatives afin de quantifier le statut de vulnérabilité de chaque espèce exploitée.

Cette étude est financée par le programme de promotion de l’exploitation certifiée des forêts (PPECF) de la COMIFAC et Gembloux Agro-Bio Tech. Elle est  mise en œuvre par Gembloux Agro-Bio Tech (Université de Liège) en collaboration avec l’asbl Nature+, l’ATIBT, le Missouri Garden Botanic (section Afrique), Parcs Gabon, et les bureaux d’étude TEREA, FRMi, et SylvAfrica.

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